La pensée sauvage
Viola tricolor (L.)
La pensée sauvage est une petite plante herbacée de 10 à 40 cm, qui se développe communément dans les champs et les terrains vagues ou sur les bords de route. Assez rare en région bruxelloise, c’est surtout dans les jardins qu’on l’y trouvera, cultivée pour ses couleurs ou alors, pour ses propriétés médicinales. Annuelle, bisannuelle, ou pérenne à courte durée de vie, elle réalise son cycle de vie en un ou deux ans, voire un peu plus.
Les tiges, plus ou moins étalées ou dressées, portent des feuilles alternes ovales allongées. Celles du bas sont portées par un long pétiole et leur bord est crénelé. Plus on remonte sur la tige, plus le pétiole devient court et le bord de la feuille denté. A la base du pétiole, au point d’insertion avec la tige, se trouvent 2 stipules fortement découpées, ressemblant à de petites feuilles composées. Les fleurs, solitaires, prennent naissance à la base des feuilles. Composées de 5 pétales, elles ont une symétrie bilatérale bien marquée et leur configuration est très semblable à celles des violettes qui appartiennent au même groupe botanique, les Viola.
D’assez grande taille, les fleurs de la pensée sauvage mesurent, verticalement, de 1,5 à 2,5 cm. Le pétale inférieur se prolonge vers l’arrière par un éperon assez court, sorte de petit cornet dans lequel est produit et stocké du nectar destiné à attirer les insectes pollinisateurs. Les pétales sont vivement colorés, d’une ou plusieurs des trois couleurs suivantes : le violet, le jaune et le blanc, d’où le nom latin de l’espèce, tricolor. Des lignes colorées bien apparentes rayonnent vers le centre de la fleur comme pour indiquer le chemin d’accès au précieux nectar et diriger, par la même occasion, les visiteurs vers les parties reproductrices. En décortiquant un peu une fleur, on distingue, sous les pétales, 5 petites pièces vertes, un peu plus courtes que ceux-ci, les sépales. Au centre de la fleur se cachent 5 étamines et un gros ovaire renfermant de nombreux ovules bien visibles à la loupe, si l’on prend la peine d’effectuer une coupe. Les 2 étamines inférieures se prolongent dans l’éperon par un appendice producteur de nectar. Les insectes, qui profitent d’un abondant nectar pendant une longue période de l’année, assurent la pollinisation. Par la suite, la fleur fane et l’ovaire se transforme en un fruit sec qui s’ouvre spontanément en trois valves dès qu’il parvient à maturité. Les graines, surmontées d’un petit appendice huileux sont attractives pour les fourmis, qui se chargent alors de leur dispersion.
La pensée sauvage apprécie les stations ensoleillées et les sols sablonneux, pauvres en matière organique. Elle supporte les forts contrastes hydriques et s’installe volontiers sur les sols laissés à nu ou qui manquent de couverture. Elle indique souvent un certain lessivage.
Depuis longtemps, pensées et violettes ont intéressé les horticulteurs, attirés par les belles couleurs et la taille respectable de leurs fleurs. De multiples variétés en ont résulté, par mécanismes d’hybridation et de sélection. Ces variétés sont toutefois nettement moins intéressantes, non seulement en termes de biodiversité, mais aussi sur le plan médicinal. Si vous l’installez au jardin, préférez donc l’espèce sauvage qui, de plus, se resème très facilement d’année en année.
Sur le plan médicinal, la pensée sauvage est connue et utilisée de longue date. Excellente dépurative, elle nettoie le sang de ses toxines, ce qui a un effet bénéfique sur les problèmes de peau, sur l’arthrite, les rhumatismes et la goutte. Ainsi, elle se montre particulièrement efficace, en interne comme en externe, pour traiter diverses affections cutanées comme les croûtes de lait, l’eczéma, l’acné, le psoriasis… A cela s’ajoutent des propriétés anti-inflammatoires, antispasmodiques et expectorantes. Mais attention, mal dosée, la pensée peut s’avérer vomitive. Difficile à trouver de qualité en herboristerie, probablement parce qu’elle perd assez rapidement ses propriétés une fois séchée, il vaut mieux la cultiver au jardin si l’on souhaite l’utiliser.
La pensée des champs, une autre espèce proche et nettement plus courante à Bruxelles et en Brabant présente des propriétés médicinales similaires. Ses fleurs, plus petites, n’atteignent que 7 à 13 mm verticalement. De couleur variable, les pétales sont un peu moins colorés, souvent jaunes ou blanc jaunâtre, les supérieurs parfois violets ou tachés de violet et l’inférieur pourvu d’une grosse tache jaune. Vous la trouverez dans les terres cultivées, les terrains vagues et même sur les ballasts des chemins de fer.
Sources :
– Guide Delachaux des fleurs de France et d’Europe, David Streeter, Christina Hart-Davies, Audrey Hardcastle, Felicity Cole, Lizzie Harper, 2ème édition revue et augmentée
– 55 plantes médicinales dans mon jardin, Les cultiver, les récolter, les conserver, Virginie Peytavi, Terre Vivante.
– Le petit Larousse des plantes qui guérissent, G. Debuigne, F. Couplan, Éditions Larousse
– Le livre des bonnes herbes, Pierre Lieutaghi, Actes Sud