Centre Régional d'Initiation à l'Écologie • Ferme d'Uccle • Région Bruxelles Capitale

Centre Régional d'Initiation à l'Écologie
Ferme d'Uccle • Région Bruxelles Capitale

Le bouillon blanc

Le bouillon blanc

Cierge de Notre-Dame

Au cœur de l’été surgissent ici et là, au milieu des paysages dénudés, des espèces de grands chandeliers jaunâtres : les épis du bouillon blanc. Peu exigeant, celui-ci apprécie les sols secs et colonise les terrains vagues, les friches et décombres, les bords des chemins et des voies de chemin de fer… Bien qu’il s’agisse d’une plante herbacée, le bouillon blanc est particulièrement grand et robuste même si sa graine minuscule ne laisse nullement présager d’un tel développement, lui qui atteint régulièrement 1,5 à 2 m de haut. 

Grande plante bisannuelle, le bouillon blanc, Verbascum thapsus, se voit et se reconnaît de loin, du moins lorsqu’il parvient à sa deuxième année de développement et que sa tige florifère bien droite est entièrement développée. Toute la plante est velue, couverte de poils laineux blanchâtres, ce qui lui donne un aspect vert grisâtre et est à l’origine du nom commun de la plante, bouillon blanc. Ces poils lui assurent une excellente protection contre l’évapotranspiration, elle qui colonise les espaces ensoleillés et peu couverts.  La racine principale pivotante s’enfonce profondément dans la terre comme une carotte, à la recherche d’eau et de minéraux, autre atout pour coloniser les terrains pauvres et secs. Dans sa première année, la plante ne développe qu’une simple rosette de feuilles ovales velues, douces comme du velours qui peuvent atteindre 40 à 50 cm de long. La deuxième année, au centre de la rosette, apparaît un gros bourgeon qui donnera naissance à une longue et robuste tige feuillée dans le bas et fleurie dans le haut. Les feuilles sont épaisses, leur bord est crénelé et les nervures, bien visibles, surtout à la face inférieure, forment un réseau assez serré. Les feuilles portées par la tige sont alternes, plus petites et plus allongées que celles de la base. Elles se prolongent vers le bas, le long de la tige, presque jusqu’à la feuille inférieure. A mi-hauteur de la tige apparaît l’épi de fleurs. Long, dense et laineux, il est parfois ramifié à la base.

Les fleurs, d’un beau jaune soufre, mesurent de 1,5 à 3 cm de diamètre. Elles s’épanouissent dès la fin du mois de juin et jusqu’au mois de septembre mais chaque fleur ne s’ouvre qu’une seule journée, voire, une partie de journée. La floraison est progressive et débute au bas de l’épi pour se poursuivre vers le haut.  Légèrement irrégulières, les fleurs se composent de 5 pétales soudés à la base et répartis de la sorte : 2 pétales sont franchement orientés vers le haut, suivis de 2 latéraux, puis du pétale inférieur légèrement plus grand.  Au centre de chaque fleur, 5 étamines sont bien visibles ainsi qu’un long pistil terminé par une massue. Les trois étamines supérieures sont assez petites et couvertes de poils blancs, les deux inférieures sont nettement plus grandes et non velues. Les étamines libèrent un abondant pollen orange qui attire une multitude d’insectes durant tout l’été, dont de nombreuses abeilles solitaires. Comme elles n’arrivent à maturité qu’après l’organe femelle, la pollinisation croisée est clairement favorisée même si l’autopollinisation reste possible et devient même la règle lorsque les insectes n’ont pas joué leur rôle durant la journée. Une fois fécondée, la fleur se transforme pour donner une capsule, fruit sec s’ouvrant par deux valves, qui contient plusieurs centaines de graines. Une seule plante produisant de très nombreux fruits, la quantité de graines libérées est énorme. Leur pouvoir germinatif pouvant perdurer plusieurs dizaines d’années, inutile de dire qu’une fois installé, le bouillon blanc l’est pour de nombreuses années, et c’est tant mieux pour les multiples espèces qui en dépendent. Car si les fleurs attirent les butineurs, les feuilles nourrissent les chenilles de plusieurs espèces de papillons, dont la cucullie du bouillon blanc, ainsi que de petits charançons. 

Mais, à côté d’un rôle certain pour la biodiversité, le bouillon blanc accompagne l’Homme de longue date et les liens qui les unissent sont nombreux. Ainsi, par exemple, le bouillon-blanc était considéré autrefois comme plante “magique” permettant de conjurer les malédictions. Les épis fanés et secs étaient débarrassés de leurs feuilles et enduits de cire pour en faire des flambeaux utilisés lors de processions ou des cierges, d’où le nom de cierge de Notre-Dame. Les feuilles ont été fumées en remplacement du tabac et les fleurs fournissaient des colorants jaunes et verts, qui ont été utilisés pour teindre les textiles. Les capsules mûres avec leurs graines, toxiques pour les poissons, étaient broyées et les braconniers s’en servaient pour attraper le poisson. Cependant, le bouillon blanc doit en grande partie sa popularité à ses propriétés médicinales. Réputé efficace depuis l’Antiquité pour soigner les affections respiratoires et comme cicatrisant, ces propriétés sont actuellement confirmées. Ainsi, toute la plante est riche en mucilages, substances adoucissantes, qui calment les irritations de la peau et des muqueuses ainsi qu’en divers autres composants anti-inflammatoires, antimicrobiens… Aujourd’hui, le bouillon blanc est préconisé en cas d’inflammations des bronches, d’enrouement, de trachéite, mais également pour traiter les douleurs intestinales et soigner les irritations de la peau. Si les fleurs sont généralement recommandées, sachez toutefois que les feuilles présentent les mêmes propriétés, peut-être à un degré moindre, mais qu’elles sont présentes tout l’hiver ! Ainsi, l’infusion de fleurs ou de feuilles est utilisée en interne ou en externe, sous forme de compresses. Les cataplasmes de feuilles cuites dans du lait sont préconisés pour absorber les furoncles, panaris, abcès et soigner les gerçures. Attention cependant, les poils qui couvrent toutes les parties de la plante sont particulièrement irritants et une filtration soigneuse est nécessaire, quelle que soit la préparation réalisée ! 

Bibliographie :

Le livre des bonnes herbes – Pierre Lieutaghi – Actes Sud
Le petit Larousse des plantes qui guérissent – François Couplan – Larousse
Du bon usage des plantes qui soignent – Jacques Fleurentin – Ouest-France